INTRODUCTION AU SYSTEME DE SECURITE SOCIALE DU MALI

Publié le par SAYONCOUL

Par Sayon COULIBALY

Juriste d'Affaires

 

L’extension de la sécurité sociale dans les pays en développement vise d’une part, à accroître la qualité de la sécurité sociale institutionnelle pour les travailleurs de l’économie formelle et d’autre part, à offrir une couverture du risque de perte de revenu et des soins de santé aux travailleurs de l’économie informelle et des travailleurs indépendants. Le concept « d’extension » vient du verbe étendre du latin « extendere » qui signifie « déployer (un membre, une partie du corps) dans sa longueur ou rendre quelque chose plus long, plus large ; faire couvrir une surface plus grande à quelque chose ».1 Il désigne, en outre, « l’action de donner à quelque chose une portée plus générale, la possibilité d’englober un plus grand nombre de chose ».2 Quoiqu’il en soit cette action suppose l’existence de quelque chose à l’origine qui doit ou peut être développée ou élargie. La notion de sécurité sociale « véhicule d’abord l’objectif de combattre la précarité sociale et de mettre les travailleurs à l’abri du besoin. C’est cette finalité macro économique qui justifie le recours à l’adjectif « social » entendu comme objectif d’atteindre toute la population, sans, exception. Elle suggère que l’on se trouve en présence d’un besoin socialisé qui demande à traitement collectif. Mais ce même qualificatif peut véhiculer aussi la dimension humaine de l’œuvre, en choisissant délibérément de corriger le fonctionnement des lois économiques par des mécanismes justifiés par des considérations à caractère social ».3 Traditionnellement, la sécurité sociale comprend des systèmes d’assurance sociale obligatoire (fondés sur des cotisations prévues par la loi), l’aide sociale (sous la forme de prestations financées par l’impôt et servies uniquement aux personnes à faible revenu) et les prestations universelles (des prestations financées par l’impôt servies indépendamment des revenus ou des ressources). Il est important de souligner le sens large cette notion qui inclut non seulement les systèmes publics de sécurité sociale mais aussi les systèmes privés ou communautaires ayant des objectifs similaires, tels que les mutuelles et les régimes de retraite conventionnels, à condition que les contributions à ces systèmes ne soient pas entièrement déterminées par le marché. La notion de sécurité sociale se distingue de celle de protection sociale. Il n’est pas aisé de cerner cette notion dans une définition car elle fait l’objet de plusieurs conceptions différentes. Par exemple, dans une approche restrictive, la notion de protection sociale se confond pratiquement avec la conception large, ci-dessus décrite, de la sécurité sociale. Cependant, dans une conception holistique, généralement adoptée par les institutions financières internationales, elle correspond à la notion « gestion des risques sociaux ».4 En d’autres termes, la notion protection sociale fait davantage référence aux politiques sociales alors que celle de sécurité sociale renvoie à des mécanismes spécifiques de redistribution de richesse qu’ils soient légaux ou conventionnels. Il est de plus en plus faire recours à la notion de protection sociale pour prendre en compte les problèmes auxquels sont confrontés les pays en développement et les réalités de l’économie informelle.5 L’extension de la sécurité sociale renvoie donc à l’élargissement du champ d’application personnel et matériel des systèmes de sécurité sociale en vigueur dans les Etats. Dans le cas des PED, cette extension est portée par la greffe d’un système étranger et par l’influence du droit international. Situé au cœur de l’Afrique de l’Ouest, le Mali e s t l ’ u n d e c e s p a y s q u i comptait 14,5 millions d’habitants en 2009 et connaît un taux annuel de croissance démographique dépassant légèrement 3% par an en moyenne.20 Environ 7,6 millions de cette population résident en milieu rural (près de 70%). Le revenu par tête d’habitant est estimé à 240 dollars US qui en combinaison avec les bas niveaux de prévisions sociales, place le Mali au 166e rang mondial selon l’indice du développement humain du PNUD. Le Mali fait partie des pays bénéficiaires du Programme PPTE dans le cadre de l’allègement des dettes de la Banque Mondiale. Son système de sécurité sociale est hérité de la colonisation et il couvre seulement 5 à 10 % de la population. Dans ce contexte malien très particulier, l’extension de la couverture sociale est envisagée d’abord comme un moyen efficace de lutter contre la pauvreté et l’exclusion sociale ; ensuite comme un tremplin pour atteindre les objectifs du Millénaire fixés en 1995 à l’occasion du Sommet mondial pour développement social tenu à Copenhague.21 Mais, l’atteint de ces objectifs implique de surmonter de nombreux obstacles liés notamment le paiement de la dette, à la bonne gouvernance et au cadre législatif et institutionnel de la sécurité sociale d’une manière générale. Comment le Mali compte –t-il étendre son système de sécurité sociale pour couvrir le maximum de sa population ? Hélas, la politique malienne à l’heure actuelle en matière d’extension de la sécurité sociale n’est pas innovante et manque de volonté ; elle s’inspire plus des orientations de la Banque Mondiale plutôt que des politiques de l’Organisation internationale du travail et de l’Association internationale de Sécurité sociale qui lui fournissent déjà une aide technique dans ce sens. Une analyse de l’évolution historique du système de sécurité sociale du Mali présente l’avantage de nous permettre de mieux cerner la nature de ces obstacles et d’apprécier efficacement la stratégie d’extension choisie. Elle devrait également nous amener à pouvoir confronter facilement le cas malien avec d’autres pays membres l’espace de l’Union Economique et Monétaire Ouest-africaine (UEMOA) ou avec des Etats à revenu intermédiaire comme le Maroc. Cette comparaison devrait servir à nous édifier davantage sur la pertinence de l’option stratégique du Mali. Celle-ci s’inscrit dans les grandes orientations en matière de développement social ont été adoptées par le Gouvernement à la suite des premières assises du Développement social tenues en 2001 constituaient en fait « un prolongement actualisé » de la politique de solidarité adoptée dès1993. La politique de solidarité de 1993 avait retenu, pour l’atteinte de ses objectifs, cinq moyens parmi lesquels figuraient le développement des mécanismes de protection sociale et de réseaux modernes de solidarité (mutualité, groupes d’auto promotion). Cette politique a eu des impacts très limités à cause notamment de l’inadaptation des dispositions réglementaires.22 La deuxième phase du programme de développement sanitaire et social (PRODESS II) démarre par le document politique qui fonde la politique actuelle d’extension de la sécurité sociale. Il s’inscrit dans la continuité du précédant (PRODESS I : 1998-2002) en s’inspirant surtout des acquis réalisés durant cette première phase du Plan décennal de développement sanitaire et social (PDDSS : 1998-2007).

A venir:

"L'EVOLUTION DE LA COUVERTURE SOCIALE AU MALI"

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