L’OPERATION DE CREDIT BANCAIRE ET PROTECTION DU CONSOMMATEUR

Publié le par SAYONCOUL


 

Par Sayon COULIBALY

JURISTE D'AFFAIRES


 

      Le crédit bancaire est devenu un moyen de financement  incontournable dans l’économie. Il est pour l’économie d’un pays comme l’oxygène est à l’image du corps humain, un facteur de croissance et de développement. Particuliers et professionnels y ont constamment recours pour réaliser divers projets. L’importance de la demande de crédit a fait croître le rôle des banques en tant que financier de l’économie nationale voire mondiale. Cette mission revêt un caractère d’intérêt général d’où le contrôle exercé par les autorités publiques sur cette opération. Faire crédit est une question de confiance d’où l’étymologie du terme « credere » du latin signifiant faire confiance.

          L’opération de crédit est actuellement réglementée par la loi n°34-03 relative aux établissements de crédit et organismes assimilés, qui la définit comme « tout acte par lequel une personne met ou s’oblige à mettre, à titre onéreux des fonds à la disposition d’une autre personne à charge pour celle-ci de les rembourser, ou prend dans l’intérêt de cette dernière, un engagement par signature tel qu’un cautionnement ou toute autre garantie» (Art.3). Elle est également régie par le code commerce qui réglemente particulièrement l’ouverture de crédit. Celle-ci est l’engagement pris par la banque de mettre des moyens de paiement à la disposition du bénéficiaire ou de tiers, désigné par lui, à concurrence d'une certaine somme d'argent (Art.524).

L’intervention du législateur vise essentiellement à protéger les consommateurs en occurrence les emprunteurs qui sont généralement dans une position de faiblesse à l’égard du banquier. Raison pour laquelle la nouvelle loi bancaire  de 2006 tente d’organiser leur protection. Mais en tout état de cause les mesures de protection du consommateur prévue par cette loi sont insuffisantes au regard de ce qui se passe ailleurs notamment en France.  Un projet de code de consommation est actuellement en cours d’élaboration et contribuera certainement au renforcement la garantie des consommateurs. Les obligations légales pesant sur le banquier dans la réalisation de l’opération de crédit constituent des garanties non négligeables pour les consommateurs.

Distribuer le crédit est un métier difficile. Un exercice périlleux. On reproche aisément à ceux l’exerçant, tantôt d’en accorder trop, tantôt pas assez. On leur reproche aussi d’exiger trop garanties et de se faire payer trop cher…[1]. L’opération de crédit est donc une opération risquée à la fois pour le client et la banque. La réglementation actuelle de cette opération permet-elle de maîtriser ces risques ? Afin d’y voir clair, il conviendrait de procéder à l’examen du régime juridique de l’opération de crédit (I), ensuite la responsabilité du banquier distributeur du crédit (II).

 

                                           I.            REGIME JURIDIQUE DE L’OPERATION DE CREDIT :

 

1)      La notion d’opération de crédit

Ø  La notion d’opération de crédit est une notion économique qui recouvre diverses opération (prêt, avance, découvert, escompte etc.) pour la cerner, il faut considérer la finalité économique de chaque opération et non pas la technique juridique utilisée pour la réaliser.

Ø  Critères communs à toute opération de crédit selon la doctrine :

-          Une avance monnaie scripturale ou fiduciaire ;

-          La rémunération du créditeur (la banque) ;

-          La restitution

2)      La diversité des techniques de crédit :

      Les opérations de crédits sont susceptibles d’être classées de plusieurs manières. Toutefois, l’article 3 de la loi n°34-03 opère une distinction entre les crédits par décaissement et les crédits par signature.

a.      Les crédits par signature :

Ø  Convention d’ouverture de crédit : C’est la convention par laquelle le banquier s’engage à mettre à la disposition d’un de ses clients, pour un temps déterminé ou indéterminé, un certain crédit dont le bénéficiaire usera à sa guise soit en touchant les fonds, soit en tirant une traite ou un chèque sur le banquier.

§  Il s’agit d’un contrat innomé qui a un objet spécial : le crédit à consentir. Ce n’est pas un prêt, ni même un prêt conditionnel.

§   C’est une convention unilatérale, en ce sens que le banquier est obligé de consentir le crédit, mais le client n’est obligé d’en user.

§  C’est un contrat intuitu personae.

Ø  La lettre de crédit :C’est un titre de banque d’une nature particulière. C’est une lettre adressée par un banquier à un des ses correspondants pour l’inviter à payer une somme d’argent ou à consentir un crédit au bénéficiaire de la lettre.

b.      Les crédits par décaissement :

§  Avances :l’avance de fonds est un contrat de prêt d’argent.

§  L’escompte :c’est une opération de crédit dans laquelle la technique employée est le transfert de propriété d’un effet de commerce.

3)      La protection du consommateur

Ø  La publicité  des taux d’intérêt débiteurs et créditeurs, de commission et de régime de date de valeur (Art. 116 de la loi bancaire).

Ø  La possibilité  pour les clients de se plaindre auprès de Bank Al-Maghrib ;

Ø  Les obligations du banquier de renseigner le client, de conseil, d’information et le devoir de mise en garde de l’emprunteur.

                                        II.            Responsabilité du banquier distributeur du crédit :

 

1)      Responsabilité pour l’octroi abusif de crédit :

Pour qu’il soit qualifié d’abusif, l’octroi de crédit doit remplir certaines conditions :

Ø  En premier lieu, il doit être inadapté à la situation de l’entreprise bénéficiaire,

Ø  En second lieu, le caractère inopportun du crédit doit résulter d’une erreur d’appréciation du banquier sur la véritable situation économique et financière de l’entreprise.

Ø  En troisième lieu, il doit avoir été consenti à une entreprise dont la situation est irrémédiablement compromise, ce qui implique les conséquences suivantes : prolongement artificiel de l’activité de l’entreprise qui se trouve ainsi dotée d’une fausse apparence de prospérité de nature à tromper les tiers, et l’aggravation de son passif et par voie de conséquence, diminution de ses actifs, gage de ses créanciers

 

2)      Responsabilité pour  rupture abusive de crédit

 

Ø  Le banquier a obligation d’accorder un préavis de 60 jours à son client avant de résilier le contrat d’ouverture de crédit. En cas de non respect de cette obligation et si cela engendre des dommages pour le client, la responsabilité du banquier sera retenue.

Ø  Toutefois, la banque est libérée de cette obligation lorsque le contrat d’ouverture de crédit arrive à terme ou en cas de cessation notoire de paiement du bénéficiaire ou de faute lourde commise à l’égard de la banque ou dans l’utilisation du crédit.



[1] DAOUDI (T.), Les opérations de banque, Casablanca, Collection BANQUE, 2003, p.98.

Publié dans DROIT DES AFFAIRES

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T
<br /> J'apprécie énormement votre travail sur ce blog. En tant que Bloggeur de longue date je ne peux que vous dire "Bon courage" !!! Vive la blogosphère...<br /> <br /> <br />
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S
<br /> <br /> Merci pour tes encouragements et bientôt!!!<br /> <br /> <br /> <br />